Oui, enfin, ça y est, je sais pourquoi.
Ce sont mes racines.
une sorte d'atavisme, un réapparition subite d'un caractère depuis longtemps latent dans mes gènes.
Qui me vient de mon arrière-arrière grand Papé, celui-là même qui tricotait des chaussettes debout sur ses échasses dans un marais landais, pas au siècle passé mais carrément à celui d'encore avant.
Euh...petite précision : l'atavisme en question ne concerne pas l'amour immodéré des grosses chaussettes (quoique), ni même celui du tricot (que j'ai, pourtant, aussi, pas immodérément mais quand même).
Ce n'est pas non plus un don remarquable pour la danse sur échasses (ça se saurait), ni une passion pour les Landes (malgré ses pastis à mouououriiiir).
Bon, alors, que reste-t-il, alors ?
Eh bien, lecteurs chéris, les MOUTONS, évidemment !
Car oui, Papa, maman, j'ai quelque chose à vous dire : j'aime les moutons!
Attention : LES moutons, bêlantes bêtes, et non LE mouton, viande grasse et trop forte à mon goût d'Occidentale du XXIe siècle.
Bien sûr, ils m'ont quelquefois littéralement effrayée ("Les moutons foncent!!!", Moune, rappelle-toi l'épisode tragico-aventureux de Laugareil où mon imagination débordante avait engendré une panique contagieuse dont tu fis les frais....écartelée entre l'instinct légitime de survie et l'instinct non moins légitime de protection maternelle pour ton jeune et inconscient rejeton....).
Mais la plupart du temps, ces ovines créatures injustement déconsidérées par beaucoup de mes semblables m'attirent. Jusqu'à ce matin, je ne savais pas pourquoi. Maintenant, j'ai une explication rationnelle et héréditaire.Elle m'est venue comme ça, d'un coup, paf ! Une fulgurance. Soudain, j'ai compris. Je savais, certes, mais je n'avais pas fait le lien.
Je suis descendante de berger.
J'ai les moutons dans le sang.
En Ecosse, jeunette et joyeuse, je me revois appelant sans relâche les charmantes bestioles : come sheeps, come ! Sans succès, du reste : sans doute une question d'accent...
Il y eut aussi de multiples arrêts photo (merci Triton) pour immortaliser ces laineux animaux à chaque voyage dans le pays Basque (le menech à tête noire!!!) ou n'importe où ailleurs où j'avais le bonheur de croiser leur route (depuis Luchon, quand Bébert se prenait pour un chien de berger, jusqu'au défilé ahurissant du troupeau innombrable qui entrait en flux continu dans la bergerie en bas du monastère de Belloc...)
Et puis...et puis....tous ces moutons-dans-les-livres qui font mon bonheur de liseuse!
Celui du Petit prince, en tout premier.

Les délirants moutons de l'album "Le jour où les moutons décidèrent d'agir".

Les inénarrables héros du Génie des alpages...
Et leurs cousins irlandais, ceux dont nul n'ignore que j'en suis définitivement tombée amoureuse,
le troupeau de Miss Maple, dans Qui a tué Glenn...

Alors là, c'est un sommet. Et la contamination gagne autour de moi.
J'ai fait une adepte à Berlin, et une (au moins) dans mon collège (prof d'espagnol, pour ne pas la nommer, qui rit autant que moi et fait une pub aussi active!)
C'est LE livre que je garde, et que j'offre. D'ailleurs, sur Priceminister, ils ont bien noté que je faisais une fixette et maintenant, ils m'envoient un mail chaque fois qu'un vendeur propose cet opus !!!
Commode, car, à mon avis, je risque d'en acheter d'autres !
Sauf à Messire, qui dit qu'il n'a pas besoin de le lire tellement je lui en ai lu d'extraits à haute voix (pendant qu'il tentait d'avancer dans le dernier Ellroy ! )
On y apprend à quoi rêvent les moutons et leur façon de penser. On sait à quoi ressemble un bon berger : il n'élève pas de race à viande, il fait la lecture à ses brebis, ne porte que des vêtements faits avec leur laine... Ce qu'ils savent des vitamines, des antibiotiques, des maladies ovines.... Leur vision de l'église, du cinetière, des hommes en général...
On comprend avec eux que les humains n'ont qu'une toute petite âme, finalement, car tout le monde sait que l'âme est une question d'odorat...
Vraiment, avec cette lecture, je vous jure que vous ne regarderez jamais plus un mouton du même oeil !
Pour finir, quelques mots extraits du livre, c'est le moins que je puisse faire....
Quand Othello entre dans l'église (il croit reconnaître un cirque...) :
"Tout au fond, un homme, plus mort que vif, était accroché à une traverse. Etait-ce lui qui avait émis ce bruit? Le bélier frissonna : il avait sous les yeux la victime d'un numéro de lancer de couteaux, pieds et poings cloués aux poutres. Cela n'avait pas l'air d'être un accident. Celui qui avait lancé les couteaux savait ce qu'il faisait."