« Des piles de rubans écornaient les têtes, un mur de flanelle avançait en promontoire, partout les glaces reculaient les magasins, reflétaient des étalages(…)
De grands lustres dorés descendaient du plafond ; un pavoisement de tapis, de soies brodées, d'étoffes lamées d'or, retombait, tendait les balustrades de bannières éclatantes ; il y avait, d'un bout à l'autre, des vols de dentelles, des palpitations de mousseline, des trophées de soieries (…) »
Ah ! Au Bonheur de Dames... Mon Zola préféré (et de loin) !
AVERTISSEMENT : pour celles et ceux de mes Lecteurs qui, dès le premier paragraphe, auraient lu en zig-zag, vite-fait, à la 6,4,2… Qu’ils disent maintenant haut et fort « les histoires de fanfreluches, ça me gonfle » ou qu’ils se taisent à jamais. Qu’ils rebroussent dès ici chemin, sous peine de se retrouver errant dans les méandres des lignes qui vont suivre, empêtrés dans les rubans, entravés par les galons, étouffés sous les dentelles, piqués par des épingles de toutes sortes, bref, torturés à l’envie par la gazetière aficionada des travaux d’aiguille ET de textes à rallonge…
Rubans de satin, de velours, organdi, ruban de soie à broder, gros-grain, croquet... Rubans fantaisie : de paillettes, de fleurettes, tricolores, brodés ...Dentelles de nylon, de coton, d'organdi, guipure, entre-deux, dentelle de Calais, broderie anglaise ... Biais, passepoils de satin, extra-fort, talonnette… Queue de rat ou de souris… Passepoils, galon de pompons, pampilles, franges ... Boutons de toutes tailles, toutes formes, toutes matières, toutes couleurs… Strass, perles de rocaille et cristal, toupies, facettes, chaînettes, cabochons à coudre ou à coller...Voilette à chapeau, crin, plumes de coq… Canevas, toiles à broder… Fils : de soie ou de coton, mouliné, retors, cordonnet, laine Colbert... Ciseaux, dés, mètre ruban, épingles à tête de nacre, aiguilles diverses… Et les étoffes ! Satin de soie, satin duchesse, feutrine, panne de velours, tarlatane, plumetis, résille et tulles fantaisies... Et les laines !!!
Je ne puis tout citer, la tête me tourne, je suis ivre de plaisir des yeux, des doigts, d’idées, d’envies de création…
Ah ! Le bonheur irremplaçable de farfouiller dans une mercerie ! Cette passion, sachez-le, lecteurs adorés, a pris racine en moi il y a bien loooongtemps ! J’étais fillette, mon âge se disait avec un seul chiffre, et une amie de mon arrière-grand-mère, Henriette D., ex-couturière du village, m’avait offert sans doute l’un des cadeaux qui m’ont le plus marquée, un de ceux qui provoquent encore en moi, après plusieurs décennies, le même frisson de plaisir : une poche (eh oui, chuis du sud-ouest moi ! Ici, pas de sacs ou de sachets : c’est le pays des poches) remplie de menus restes de couture… Bouts de galons, rubans ou dentelle, fils, boutons, épingles, chutes de tissus… Ce fut ma première fois. On n’oublie pas ses premières fois. Mes premières émotions de dingue-de-mercerie. Je ne crois pas en avoir fait autre chose que les sortir et les recenser inlassablement, en faire un inventaire émerveillé et sans fin. Pas grave : l’impulsion avait eu lieu, le germe était en terre et allait forcément donner fruit.
Depuis, j’en ai brodé, des canevas ! Cousu, des tissus ! Appliqué des rubans, galons, perles ou paillettes ! Tricoté, des pulls ! J‘en ai passé, des heures chez Toto, Bouchara, Alex***… Au Roi du Bouton (R.I.P), sur le marché de St Mich… Et sans jamais me lasser, Lecteurs, chéris !
Ceux qui me côtoient d’assez près savent aussi que j’aime les boîtes. Les belles boîtes en fer rétro, vieilles ou jeunes. J’y range et classe donc mes boutons, mes rubans, mes dentelles, mes fils multicolores… Perles, fleurs et pompons : vous trouverez de tout dans la Cabine Magique de Zigobelle ! Je me crée, en quelque sorte, ma petite mercerie personnelle. Je joue à la marchande et à la couseuse ! Je retombe en enfance, vous croyez ? Que nenni ! J’ai toujours pris garde d’y garder un pied et une bonne partie de la tête :-)
Voyez, j'ai déjà mon enseigne de créée...
Evidemment, ce que j’aime par-dessus tout, ce sont les vieux trucs… C’est qu’on soignait la présentation « dans le temps ». La moindre étiquette, la moindre carte à fil étaient élégantes, gracieuses, exotiques… Les marques de fil rivalisaient d’imagination pour éditer de belles images afin de promouvoir leurs créations. Autant la pub me hérisse, autant la réclame me plaît !
Heureusement, je n’ai ni la place ni les finances, sans cela… je crois que je serais envahie de vieilles bobines et boutons ! Entre autres ;-) Parce que j’en ai déjà quelques-uns de ces jolis objets d’antan… Toujours des présents. Des vieux fonds de tiroir ou de grenier que mes proches retrouvent et dont ils me font cadeau.
J’adoooooooooooore !
A suivre dans le prochain épisode, pour les bons élèves qui ont tout bien écouté jusqu'au bout : en récompense, de belles images d'antan !
***En toute sincérité, et avec un souci légitime d’édification de mon Lectorat, j’avoue avoir buté quelque temps sur l’accord de cette série de participes passés… Ce « en » antécédent m’a fait l’effet d’un grain de sable dans une bouchée de doucette. Cela crissait désagréablement à l’œil (si, si !) et je fus perplexe. Problème existentiel de taille J Je pense avoir trouvé la solution ici : http://la-conjugaison.nouvelobs.com/regles/orthographe/l-accord-du-participe-passe-precede-de-en-184.php Donc, je n’ai pas accordé. En espérant avoir bien compris la subtilité !